Dans mon précédent article, j'ai exprimé l'idée que la période que nous vivions nous imposait un retour à plus de simplicité. Nos besoins se sont concentrés brusquement sur ce qui est vital, questionnant violemment nos comportements passés, mais aussi nos comportements futurs.
Notre première réponse réflexe
Tout naturellement, notre première réponse - quand c'est faisable - est de "gérer la crise". C'est le moment où chacun fait ce qu'il peut, s'adapte, change ses pratiques, modifie ses habitudes pour s'assurer un minimum d'activité et/ou se montrer solidaire. De la difficulté nait un premier niveau de créativité, de nouvelles idées : les restaurateurs réinventent leur métier pour proposer des plats à emporter, des entreprises produisent des masques, des gels hydroalcooliques, les agriculteurs organisent des systèmes de livraison, etc...
De la difficulté survient aussi des nouvelles conditions qui permettent de franchir un cap dans la confiance mutuelle. Le management et les directions, qui ont parfois du mal à accepter la pratique du télétravail, se retrouvent à l'encourager, forcés d'accepter cette unique solution pour conserver un minimum d'activité.
Avec le temps - déconfinés ou non - nous continuerons les adaptations : relance, maintien ou modification des activités, maintien ou développement du télétravail, modification des process et des procédures, adaptation des outils de travail à ces nouvelles méthodes, modification des accords et dispositifs RH pour accompagner tous ces changements. Nous retrouverons aussi nos vieux démons, notamment celui du besoin de contrôle et de maîtrise, férocement présent dans notre société.
Je suis prêt à parier que nous continuerons à répondre "matériellement" à la situation : structure de travail, outil, process. Et, de fait, ces moyens que nous mettrons en oeuvre (souvent à grand renfort d'investissement de temps et d'argent) répondrons à certains de nos besoins. Du moins aux plus urgents.
Néanmoins, cela suffira-t-il à gommer dans le temps les doutes et questionnements déjà très présents avant le COVID et dont la puissance a été décuplée pendant cette période?
Toujours le même oubli
Je vous invite à vous intéresser à une étude portée par Harvard (https://www.adultdevelopmentstudy.org/, dont un TED Talk que je vous recommande) depuis plus de 80 ans par Robert Waldinger (entre autres, il n'est pas si vieux!).
Le But? Identifier ce qui rend le plus heureux et permet de conserver la santé le plus longtemps possible.
Le principe? 724 hommes au départ, puis leurs 2000 enfants, sont suivis depuis 1938, et sont interrogés sur tous les pans de leur vie : santé, personnel, professionnel.
Les premiers résultats? Trois enseignements principaux :
Les relations conservent la santé et permettent de vivre plus vieux et plus heureux. L'isolement, lui, a l'effet inverse.
C'est la qualité de la relation qui compte. Pas le nombre de follower sur Instagram ou... LinkedIn !
La douleur émotionnelle augmente la douleur physique ressentie.
Ces résultats tendent à montrer que les relations et leur qualité font partie des besoins vitaux.
Il n'y a donc aucune surprise quant aux questionnements que nombre d'entre nous développons durant cette période de "distanciation sociale".
Nous apprécions ce moment de proximité familiale si rare et... nous regrettons le manque de liens avec l'extérieur.
Nous apprécions ce moment de "recentrage" et... nous détestons notre inutilité et l'appauvrissement social de nos vies.
Alors, pour répondre à ce besoin vital trop souvent oublié et qui, appliqué au milieu de l'entreprise, permet d'en comprendre nombre de dysfonctionnements, le seul investissement pérenne ne concernerait-il pas le collectif ? Les liens sociaux au sein de l'organisation? Les dynamiques de collaboration ?
Et si, pour changer, nous prenions le pari de capitaliser sur la relation de confiance qui s'est tissée ces deux derniers mois afin de modifier en profondeur nos fonctionnements ?
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